Siège de ton c**

De ton cul vaste comme l’enfer

Versent le bronze et l’airain

L’or des rois déchus, le fer

Qui sommeillait dans les souterrains.

*

Ardent et flamboyant comme un Cœur

Dans la grotte, ton Amour palpite

A la façon d’une térébrante lueur

Venue des Enfers qui crépitent.

*

Babines roses, Jérusalem

De chair, je suis Saladin, Baudoin

Entre les remparts de viande blême

Et de poils, abandonnés aux sagouins.

*

D’un coup de lance rouge et brune

Et d’un cri de bête – tigre, éléphant

Je fends, déchire la pleine lune

Et récolte ton lait, triomphant.

Je voudrais être ta robe

Ne jamais quitter ce creux

Tendre et moelleux

Où le paradis se dérobe.

Extinction

« Qu’il me donne les baisers de sa bouche : meilleures que le vin sont tes amours !

Délice, l’odeur de tes parfums ; ton nom, un parfum qui s’épanche : ainsi t’aiment les jeunes filles ! » Cantique des Cantiques

Mon cœur est un tombeau de marbre blanc

Sur lequel s’ébattent, s’enlacent deux amants

*

Le Divin et l’Eros sous le vesper

Midi de l’Homme qui en silence espère.

*

Il bat d’une sourde et chaude pulsation

Sommets du Paradis jusqu’aux Tréfonds,

*

Prisonnier du feu du désir, sanglant

Par les fissures et les trous béants,

*

Et cette rouge offrande aux déesses païennes

Qui dorment dans les terres anciennes,

*

Nourrit l’arbre immense de son désir

Que je peux embrasser et saisir.

*

Toute la Création me parle en Elle

A la façon de l’Ange Gabriel.

Je voudrais boire à son cœur de nuage

L’orage des Dieux de l’Orient, le sang

Rédempteur qui crie dans le soir éblouissant

Pour le Pauvre et la Femme sans âge.

*

Son regard a l’odeur du cerisier

Qui transforme en poussière l’Eternité

Sous les sabots que portent les alizées

Jusqu’au fond de son jardin sombre et fruité.

Argos

Je garde au creux de mon esprit

Creux comme un chêne moussu

La vieille image de ton corps

De dryade aux cheveux d’or

De ta bouche aux lèvres fessues

Et de ton rire dont je m’épris.

*

Il pleut, il ne cesse de pleuvoir

Sur mes mains, et dans mon cœur

Enfermé au fond du cercueil d’os

De ma poitrine, et tel un sacerdoce

Je m’astreins à cultiver la fleur

De ce souvenir souvenir illusoire.

*

Le vent chante et chuinte par mes côtes

Ouvertes au courroux de l’Océan

Et de ses anciennes puissances

Bleues et vertes volant avec aisance

Dans tes yeux tel un vol de goélands

Raillant le voyage des Argonautes.

*

Et l’Argos peu à peu disparaît

Voiles blanches gonflées, marins

L’esprit fixé vers le Léthé

Oubliant celles qui les ont allaités

Se jetant vers de gris lendemains

Ils s’en vont avec désintérêt.

*

Et sur les rochers reste Médée

Ivre de douleur et le sein nu

Maudissant les Dieux et ses enfants

Mêmes, dont les rires comme un oliphant

Dit « Jason » et le sang répandu

Par une pauvre femme obsédée.

Jardin

Dans tes yeux je plonge à la façon du Gange

Timide et honteux

Et j’en ressors vigoureux, vierge de toute fange.

*

Sous mes doigts le târ de ton corps se ploie, gémit

Et chante les arias d’un orient perdu

Sous les troubles visions d’Orphée et de Jérémie.

*

Et entre mes doigts sourds filent tes cheveux de minuit

Calligraphie de nos plaisirs secrets

Fracas des étoiles qui nous arrosent de leur pluie.

*

Aveugle, je pousse la porte de ce jardin fleuri

Parfum de rose, de soleil

Dans cette vaste chambre aux douces odeurs de fruit.

Toit du Monde ! Tes seins surplombent

De leur ombre mes mains, offrande,

Sacrifice, je reçois ce sang

Flot incessant, feu éblouissant.

*

Et quand de ta bouche carmin s’écoule

Un mantra d’amour, un millier de langues,

Je m’accroche tel un pécheur à tes hanches

Me délectant du miel de l’aghoul.

*

Tous les fleuves coulent dans tes boucles

Brunes, entre mes doigts ils sont serpents

Et lourds d’un parfum qui étouffe

Dans le soir pourpre et enveloppant.

Mare

Elle a noué l’infini autour de mon arc

De tendresse le nœud de l’Univers

Qui chante le Désir; se faisant monarque

De mon vit, elle a fait fondre l’hiver.

*

Nos existences se dissolvent, se fissurent

Entre nos lèvres jointes, corolles pourprées

De fleurs aux motifs de damassures

Sur nos peaux fatiguées et mordorées.

*

Et soudain les flots, surgissement nacré

Flot brûlant d’Amour sur ses tétons bruns

Et ses yeux plongeant dans les miens, affamés

Et se délectant du parfum des embruns.

Extase de Sainte ****

Ses seins sont un vase

Où je déverse

Mon amertume

Ce que nous fûmes

Qui nous traverse

Globes doux d’ambroise.

*

Sauvagement

Elle ouvre le voile

De l’illusion; mort

Sublime, le mors

Pour fuir les étoiles

Et le firmament.

*

Mon visage est trône

Pour ses fesses

Source d’un Mystère

Profond dans la Terre

Et cette déesse

Donne l’aumône.

*

Elle a pour bâton

Magique mon vit dur

Envieux de sa bouche

Sitôt qu’elle touche

Telle une brûlure

Luisant Phaeton.

Le pont et la porte

Tant d’infidèles alors que tu foules le sol

Des routes et des temples de ce monde nu,

Évangile vivant d’une beauté folle

*

Vêtue de l’Univers et seins nus,

La surface rougeoyante de mon cœur,

Désir battant pour le vin de grenade

*

Perlant de tes lèvres, rivière de douceur

Et plus nourrissant que les sermons de al-Hallaj;

– l’entends-tu gémir, et hurler de sa potence :

*

« Je suis la Vérité ! », crucifié lui aussi,

Il chante pourtant l’Amour pur et immense

A ses bourreaux rendus tout faibles et petits.

*

Et quand je te presse contre mon cœur

Je te dis : « Je suis le Pont et la Porte »,

Traversant l’Eternité et ses lueurs,

*

Et murmurant ton nom au faîte de notre

Étreinte, unis comme l’épée et le fourreau

Et caressant les pommes d’or de tes seins;

*

O soif ! Tu es un terrible bourreau !

Car tu me tentes avec ses tétons bruns

Et ses yeux plus profonds que les Neuf Cercles

*

Qui font déchoir et pleurer mon âme

Dans une fosse où règne luxure et ténèbres

Maintenues en stricte laisse par cette femme !