À C. – petit poème en prose, sur la pathétique imitation de Charles Baudelaire

Je pourrais jeter aux ordures tous les livres, tous mes poèmes et tous les vers qu’ils contiennent, pour pouvoir passer une journée, une heure, une minute, une seconde avec toi; t’embrasser, effleurer ton front, sentir ta présence, et puis mourir de joie et de désespoir, comme ces conquérants partis chercher l’or et l’argent en Afrique et aux Amériques pour leurs rois pauvres. Moi, mon roi, il dort dans mon coeur, et l’or et l’argent que je cherche, ils sont dans tes yeux, dans ton sourire. Il est paresseux aussi mon roi, il ne sait plus, il ne veut plus parler, écrire, chanter. Il est là dans un lit somptueux, sous de riches et épaisses fourrures, attendant naïvement le Salut de l’amour. Parfois d’autres organes lui parlent; non : ils ricanent. C’est tantot le foie, tantôt le genou droit, tantôt l’index gauche. Ils disent :  » Il est bien sot! Ce tambour de chair bat là une mesure étrange et grotesque ! Ce n’est pas une parade ou un menuet, c’est une danse macabre! » Alors je sens toutes les vertèbres cliqueter dans mon dos, mes côtes grincer comme les planches d’un cercueil de bois vif. Et mon roi se retourne dans ses fourrures et ses terreurs nocturnes sans âge…

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